Jeudi 6 juillet 2000
Résumé :
départ vers Rahonira et les monts de l'Isalo puis
visite de la piscine naturelle.


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La veille j'avais réservé une place de
taxi-brousse.
Incroyable, le taxi va partir à l'heure. Il y a un appel des passagers, on n'est pas en surcharge, du moins légalement. Il s'agit d'un minibus japonais, selon la réglementation malgache, il n'y a qu'un passager de plus par rangée par rapport au nombre de places prévues par le constructeur. Je suis à côté du chauffeur, ce qui est très confortable mais très dangereux. Inutile d'espérer trouver une ceinture de sécurité ou un airbag. Le chauffeur roule à tombeau ouvert. On est sur la meilleure route de Mada, l'une des rares qui mérite de porter le nom de route, presque toutes les autres sont des pistes défoncées. Notre vitesse de croisière se situe autour de 120 km/h, ce qui est trois fois plus rapide que la vitesse moyenne. Compte tenu de la surcharge du véhicule et de la tenue de route problématique ce voyage est très stressant, il ne me reste qu'à serrer les fesses pour freiner, mais ce n'est pas très efficace.
Enfin une cinquantaine de kilomètres de piste. Ça secoue, mais le stress dû à la vitesse retombe, mais quand la piste redevient une route, c'est reparti à fond la caisse.
Les paysages qui défilent changent mais sont toujours de toute beauté. Je garde gravé dans ma mémoire les quelques grands Baobabs qui trônaient au milieu de la savane. Ils sont plus grands et mille fois plus majestueux que ceux de la forêt de Baobabs d'Ifaty.
Je descends à Rahonira vers midi. Juste après la fermeture du bureau de l'Angap. L'Angap est l'organisme qui gère les visites des parcs nationaux. Malheureusement dans ce pays on ne se sent pas en liberté. Il est interdit de randonner seul dans les sites intéressants. Il faut toujours prendre un guide. On pousse aussi à la consommation en nous proposant des porteurs. Bien sûr, cet argent fait vivre les populations locales, il n'y a pas de misère autour des parcs, en plus cette ressource économique favorise le respect écologique. Je préférerais payer le montant nécessaire et, comme tout bon routard, me débrouiller seul avec une carte et une boussole.
Je n'avais pas sorti un pied du taxi-brousse que déjà trois guides me tournaient autour comme des mouches. Impossible de respirer. J'obtiens une trêve pour chercher un hôtel, changer de l'argent au noir et prendre un repas. L'hôtel que je choisis est propre, c'est semble t-il le seul qui le soit, il est presque complet alors que les autres sont vides (et plutôt craignos).
La trêve étant terminée, je n'ai pas fait un pas en direction de l'Angap que les guides reviennent à la charge. Finalement c'est avec le dénommé Emmanuel que je vais partir. Comment ce choix s'est-il fait ? Maintenant les choses sont plus claires, et je suis un peu plus tranquille si ce n'est qu'Emmanuel ne me lâche pas d'un mètre, il doit avoir peur que je m'échappe. Au bureau de l'Angap je choisis mon itinéraire avec son aide.
Le parc national à proximité du village de Rahonira s'appelle l'Isalo (prononcer Ichal). Depuis le village, vers l'ouest, on voit une longue chaîne de montages rouges sortant presque sans transition de la savane. Dans les autres directions, c'est la plaine. Il y a plusieurs randonnées classiques. Les plus rapides 2 à 3 heures aller/retour sont la "piscine naturelle" et la "cascade". D'autres vont vers des canyons ou passent au-delà de la première ligne de crête. Je choisis d'aller l'après-midi même à la "cascade" et le lendemain une rando de 9 heures passant par un canyon, puis en pleine montagne et retour par la "piscine naturelle".
C'est parti pour la cascade. Le guide est très "pro", pas un sourire juste un "ah-oui-oui-non-non" en guise d'accusé de réception de tous mes commentaires ou questions. Cela lui donne sans doute le temps de réfléchir pour élaborer sa réponse. La cascade est un avant goût des canyons dont la visite est prévue le lendemain. Dès qu'il y a de l'eau, on passe de la savane (brûlée) à une végétation luxuriante: fougères arborescentes, bananiers etc... Les herbes sèches sont régulièrement brûlées pour favoriser la repousse d'herbe verte qui sert à l'alimentation aux zébus.
La nuit tombée, j'ai très vite fait le tour de ce village minuscule. Tout le monde est dans la rue, des centaines d'échoppes sont ouvertes. Je m'assieds sur une murette pour contempler le spectacle. D'autres guides viennent discuter. Je suis mal tombé, ils sont beaucoup plus décontractés que "ha-oui-oui-non-non", même grivois.
Je fais aussi connaissance avec un chauffeur pour touristes que je retrouverai plusieurs fois sur mon chemin. Il m'explique en particulier comment les Malgaches se procurent des Peugeots. Ils les achètent d'occasion à la Réunion. A l'arrivée sur le territoire, ils suppriment tout ce qui ne sert à rien (en particulier l'électronique). Si le moteur fonctionne à l'essence, il est en général mis à la casse et remplacé par un vieux moteur diesel (c'est mieux parce que ça fait plus de fumée noire!). J'apprends aussi que nous sommes en sécurité dans ce coin. En effet, une américaine avait été violée et tuée deux ou trois ans auparavant, les flics locaux n'avaient rien fait, mais la CIA est soit disant venu sur place pour récupérer le fautif, l'amener aux US, le juger et l'exécuter. Depuis, il n'y a plus eu d'agressions. J'en apprends aussi sur les coutumes locales de vol des zébus. C'est le sport régional.
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